Robert Louis Stevenson

4 ouvrages parus chez Magnard

La genèse du Cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde est enveloppée dans les limbes de l’Écosse, de la fièvre et des rêves. Nous sommes en 1885. Robert Louis Stevenson (1850-1894) vit alors à Bornemouth et, entre deux crises d’hémoptysie, cherche le sujet d’un petit roman terrifiant, que son éditeur lui a commandé. Une nuit, Fanny Osbourne, son épouse est réveillée par ses hurlements et interrompt le cauchemar créateur de Stevenson : celui-ci, en effet, était en train de rêver à une métamorphose terrifiante. Il la couche immédiatement sur le papier et, en trois jours, écrit deux versions du même conte. La première, née des visions nocturnes, est détruite sur les « conseils » de Mme Stevenson ; la seconde, écrite en trois jours, sert de matrice au texte qui est finalement publié en janvier 1886.

Le roman connaît un succès immédiat : l’Angleterre victorienne est fascinée par le destin tragique du docteur Jekyll, dont la vie est devenue le théâtre de la lutte entre le Bien et le Mal. Elle veut lire dans cette histoire la chute d’un homme respectable qui, pour avoir voulu libérer ses instincts et nier la morale, est voué à l’opprobre et au châtiment.

Nous pouvons y lire autre chose à une époque où la médecine découvre le subconscient et ses territoires étranges, Stevenson crée le personnage d’un savant qui interroge son moi et dont la seule vraie découverte est de prendre conscience qu’il est habité par un « autre », dont la présence est impétueuse, puis envahissante. Au-delà d’une intrigue fantastico-policière, Stevenson écrit un conte fascinant parce qu’il représente d’une façon étonnamment moderne les tourments d’un moi qui se cherche et, par là même, affirme son existence. Certes, Le Cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde est traversé par la thématique, très puritaine, de la tentation, du péché et donc du châtiment ; certes, à la fin du roman, la morale est sauve. Il n’en reste pas moins que ce qui a frappé l’oreille du lecteur, c’est la voix du docteur Jekyll qui, longtemps, veut être Hyde, même au prix de la destruction de son moi, ou plutôt, de son moi ancien. Ce roman pose la question, toujours actuelle, des risques que l’on court à tuer (en anglais : to kill) pour libérer ce qui est profondément enfoui, caché (en anglais : to hide) au fond de nous-même.

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